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empire du bien - Page 3

  • Fessée et contrôle totalitaire...

    Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Claude Bourrinet, publié sur Voxnr, consacré à la campagne télévisée de la Fondation pour l'enfance qui milite en faveur de l'interdiction de l'utilisation des claques et des fessées dans l'éducation des enfants.

    Pendant des semaines, l'"empire du Bien" va marteler son message : "La violence engendre la violence". Comme le souligne Natacha Polony, dans un excellent article publié sur son blog, Eloge de la transmission :

    "Le plus grave réside évidemment dans la manipulation intellectuelle dont relève ce message. Grave, parce qu’il s’agit de focaliser l’attention sur des gestes, gifles et fessées, qui sont courants, pour faire croire que les parents qui en usent sont des monstres, au même titre que ceux qui attachent leur enfant à un radiateur ou lui assènent des coups de ceinture. Le meilleur moyen, bien sûr, de laisser ceux-là agir en toute impunité.[...] Les milliers d’enfants qui verront ce petit film (car le premier renoncement au bon sens se manifeste face à cette télévision qu’on laisse allumée devant eux) comprendront parfaitement le message : sanction et brutalité aveugle sont de même nature, et le parent qui voudrait leur imposer quoi que ce soit, éventuellement par la force, est un bourreau. Détruire ainsi l’image d’un parent aux yeux de son enfant est une grave responsabilité. Car on ne sait jamais quels modèles de substitutions celui-ci se choisira."

     

     

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    Fessée et contrôle totalitaire

    Une campagne télévisuelle destinée à dénoncer les réprimandes corporelles perpétrées par les parents contre leur progéniture va sévir à une heure de grande écoute publicitaire. On voit à l’occasion une charmante maman péter les plombs et gifler sa mignonne fillette braillant comme un porcelet qu’on égorge, sous l’œil chagriné et désapprobateur de la grand-mère, qui va finalement compatir à la détresse de l’exécutrice des basses œuvres. Parce que pour l’idéologie dominante, héritière d’un Socrate parfois mal inspiré, il n’existe pas de véritable méchanceté, il n’y a que des personnes qui se trompent. Le mélodrame est tout trouvé : la victime n’est pas tant l’être qui éprouve la violence que celui qui l’engendre, car l’erreur rend malheureux, et, dans notre société où les excès sont traduits en termes cliniques, tout égarement est signe de maladie. Le scénario est donc conçu pour ne diaboliser personne, la scélératesse relevant d’un imaginaire quasi fantasmatique, presque hors du monde, innommable, livrée au monde légendaire des Hitler et des Staline, lesquels règnent en enfer aux côtés de Belzébuth. Mais nous sommes, en ce glorieux 21e siècle, qui voit le triomphe du dernier homme, entre gens biens, normalement voués à prendre leur pied dans les parcs d’attraction, à communier dans les supermarchés, et à n’imaginer de fessée qu’entre adultes consentants.

    Si l’on voulait pousser le vice jusqu’au petit bout, il nous faudrait invoquer notre Jean-Jacques Rousseau, qui, crypto-calviniste, comme certains contempteurs de la fessée, n’était pas avare de contradictions, notamment entre une conception irénique, idéaliste, béatifiante, de l’homme, vu comme un bon sauvage égaré dans la civilisation mauvaise et corruptrice, et les faits, rien que les faits. Par exemple, que l’homme est naturellement violent, ce qu’aucun psychologue, aucun psychiatre ne niera, et que même cette violence, à condition qu’elle soit canalisée et obéisse à des finalités de sociabilité, peut s’avérer utile. Au fond, on voit des animaux supérieurs utiliser la patte, la griffe ou le croc pour corriger, éduquer les petits, et l’être humain user de ce moyen depuis l’aube des temps, sans qu’on y ait trouvé à redire.

    Au moins, si nos puritains, qui veulent rendre l’homme, ce pécheur involontaire, parfait, propre et reluisant comme un article des droits de l’homme, avaient argué des conséquences perverses d’une correction appliquée au bon endroit. Ne voyons-nous pas notre Rousseau jouir à dix ans des mains sévères de Mademoiselle Lambercier, et avouer qu’il ne peut prendre de plaisir sexuel que de cette façon-là ? On est bien fesse-mathieu ! Voilà pourtant qui pourrait accroître le marché du sexe, lequel se porte bien dans l’univers des tartuffes libidineux qui s’occupent de nos fesses. Ce sont ces gens qui considèrent que la condition de travailleuse sexuelle est légitime, et doit même contribuer aux ressources de la sécurité sociale, tout en s’inquiétant, sur le ton indigné qu’on connaît bien, de l’intégrité de femmes abandonnées au dangereux environnement machiste. Ce sont ces eux aussi qui désirent préserver l’innocence des enfants, si tant est qu’une telle singularité existe, et qui les livrent aux jeux vidéo ultraviolents, à une télévision débilitante, à une accumulation sans bornes d’images pornographiques, invoquant dans la rhétorique jésuitique qui est la leur, la liberté du consommateur, celle du marché, et la réalité de temps permissifs.

    Ce qui ne les empêche pas de s’immiscer de façon intolérable dans l’univers privé de la famille. Déjà, dans certains pays scandinaves, les enfants ont le droit de dénoncer leurs parents et de leur intenter des procès. Par la même occasion, l’Etat obtient le droit de juger de l’éducation que donnent les adultes. D’aucuns, il y a quelques années, auraient même voulu traîner devant les tribunaux ceux dont les enfants auraient proféré des propos jugés racistes. Le délit de mauvaise éducation ne va pas tarder à être instauré. On croyait ces abus propres aux sociétés totalitaires, pourtant si dénoncés dans nos régimes « démocratiques ».

    En fait, si l’on écarte les cas notoires (il n’y a qu’à ouvrir les yeux et les oreilles) des dérangés du bocal, qui semblent prospérer parmi notre élite travaillée par les tensions contradictoires de la répression et de la permission, du contrôle universel et de l’anarchie marchande, et si l’on met aussi de côté les lubies pudibondes, nombreuses chez les scandinaves et les anglo-saxons, les travaillés du droit-à, et les fanatiques d’une société écologiquement purifiée, dont certains, comme on le sait, boivent abondamment de l’alcool fort, sans doute pour se fouetter le sang, ou s’hallucinent avec certaines substances, pour se donner des airs de Big Brother planant, on mettra en parallèle cette entreprise ubuesque avec d’autres qui visent à dénoncer les mâles (souvent de type européens) qui violentent les femmes, les Occidentaux (souvent blancs) qui maltraitent les sans papiers ou les enfants du tiers-monde, ou encore les personnes d’une autre race, les chasseurs, qui massacrent vilainement les animaux et, de toute façon, ont le tort d’être des beaufs, les curés, qui sont tous des pédophiles, les profs, qui se lèvent le matin en tirant au sort les élèves qu’ils tortureront dans la journée, les flics, qui sont d’affreux gestapistes … bref, qui s’en prennent à tout ce qui, de près ou de loin, paraît tenir lieu d’autorité ou de modèle susceptible de lier le présent au passé, et d’asseoir, si tant est que ce soit encore possible, la société européenne sur une base quelque peu solide.

    Le symbole vaut ce qu’il peut. Mais quand les parents ne pourront plus donner de gifle à leurs enfant, le marché aura le loisir absolu de leur foute un bon coup de poing dans la gueule.

    Claude Bourrinet (Voxnr, 28 avril 2011)

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  • Arguments d'un désespoir contemporain...

    Les éditions Hermann publient Arguments d'un désespoir contemporain, un essai de l'écrivain Richard Millet dans lequel il dénonce le "cauchemar posthumaniste". Richard Millet est l'auteur de plusieurs romans, récemment d'un récit, La confession négative, et de plusieurs essais polémiques comme Désenchantement de la littérature ou L'opprobre... 

     

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    "Dernier homme, déclin de l'Occident, meilleur des mondes, règne de la quantité, de la Technique, crise de la culture, homme unidimensionnel, société de consommation ou du spectacle, désenchantement du monde, ère du vide, de l'éphémère ou du moindre mal, empire du Bien, de l'éphémère ou du moindre mal, condition postmoderne, homo festivus, etc. Comment, après tant de formulations heureuses mais récupérées par le Culturel et l'Antiracisme, et sans tomber dans la nostalgie, comment nommer ce monde nouveau, ce cauchemar posthumaniste, ce totalitarisme light ? Peut-être est-il trop tard. Au moins ne serons-nous pas dupes d'une stratégie globale qui inscrit le monde dans une horizontalité toujours plus large et fade, dépourvue de relief, de hiérarchie, de verticalité, de goût, de mémoire. Autant d'arguments en faveur d'un désespoir qui soit un surcroît de lucidité. L'horizontalité est une chute sans fin, par perte, ou défaut, de sens ; sa mise en abyme : l'enfer de sa déperdition infinie. Quant à moi, je ne tombe pas de haut ; je ne reviens d'aucune illusion ; je ne suis pas chassé de hauteurs d'où je contemplais le monde dans une posture souveraine ; je ne suis pas une belle âme : l'idéalisme est un des attributs de l'horizontalité ; et vivre, c'est s'inscrire dans cette mise en abyme - et sans trop jouer sur les mots, s'abîmer. Je ne cherche pas à maintenir un système de valeurs décrétées obsolètes, parfois à juste titre [...]. La généalogie de l'horizontalité revient non seulement à prendre mesure, ou acte, des présupposés de la déconstruction de la métaphysique, de l'archéologie foucaldienne des systèmes d'oppression, de l'utilisation souvent déplacée, ou rhétorique, des machines désirantes deleuziennes, mais aussi à comprendre autrement, par exemple à partir de ma propre histoire, l'effondrement du vertical et les illusions, les brouillages, les falsifications du totalitarisme new look qui s'est mis en place sous le label démocratique. Je ne me résous pas à un phénomène de basculement historique, à une géométrie du renversement, à une logique de la résignation. Je veux tenter de dire qui je suis, et pourquoi je refuse le contemporain comme discours d'inversion générale, et non en tant que tel - ce qui serait aussi niais que de prétendre paradisiaque le monde d'où je viens."

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  • Les doigts dans la marmite diplomatique...

    Nous reproduisons ci-dessous la chronique hebdomadaire de Philippe Randa consacrée à Wikileaks et publié sur son blog.

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    Les doigts dans la marmite diplomatique...

    C’est Ben Laden qui ne doit pas être content ! La vedette lui est désormais ravie par Julian Assange, fondateur du site Wikileaks qui défraie les médias du Monde entier. C’est lui qui fait désormais trembler l’"Empire du Bien”… Ses publications de documents font moins de morts – aucun à ce jour –, mais tout autant sinon plus de ravages, semble-t-il, que les sanglants attentats des barbus de l’Oumma (communauté des musulmans).
    Le bi-mensuel Flash infos magazine lui a consacré sa dernière une. Il n’est pas le seul. Aucun media n’a passé sous silence les “faits et méfaits” de monsieur Assange, reconnaissons-le. Mais peu on fait remarquer comme Nicolas Gauthier dans son éditorial, qu’on attend toujours ces fameuses révélations contre lesquelles les gouvernements du Monde entier mettent en garde tout à chacun.
    Elles vont peut-être venir… mais celles qui ont été publiées par les grands quotidiens sélectionnés par le fondateur de Wikileaks pour trier et commenter les 400 000 documents mis à leur disposition ne sont que l’aveu de ce dont on se doutait concernant entre autres les pratiques de l’American way of life en Irak : utilisation de la torture, morts de civils irakiens, bavures des milices privées, pouvoir d’influence de l’Iran (l’actuel Premier ministre irakien, Nouri al-Maliki, soutenu par Washington, ayant dû être adoubé à Téhéran avant de commencer à former un nouveau cabinet)…
    Plus nouveau, mais tout aussi évident, les jugements émis par la diplomatie américaine sur les dirigeants européens. Silvio Berlusconi aimerait la galante compagnie… et Nicolas Sarkozy serait un perpétuel excité. L’un et l’autre ne serait guère “crédibles” comme chef d’État. Si ce sont les Américains qui le disent !
    Plus cocasse sans doute est l’officialisation que l’Arabie Saoudite ait voulu pousser à la guerre contre l’Iran. C’est sans doute le plus grave pour l’Oncle Sam qui tente de convaincre que les musulmans formeraient un bloc uni, obsédés par l’éradication de toutes les autres religions. Nombre d’islamophobes de circonstances y ont trouvé l’espoir d’exister politiquement. Patatras ! Les musulmans sont aussi divisés que les chrétiens, les haines entre branches rivales sont aussi tenaces qu’entre catholiques et protestants autrefois, voire encore actuellement… et le mépris des unes pour les autres vaut bien souvent celui des askénazes pour les sépharades, n’en déplaisent aux obsédés du fumeux “complot juif”.
    D’où les pressions pour empêcher les hébergements du site Wikileaks dans chaque pays. Chassé des serveurs d’Amazon basés aux États-Unis, le nouveau ministre chargé de l’Industrie, de l’Énergie et de l’Économie numérique Éric Besson a demandé l’expulsion du site web du territoire français.
    Dans la patrie auto-proclamée des Droits de l’homme, si prompte à dénoncer les atteintes à la liberté d’expression chez les autres, il fallait oser. Il a osé. Éric Besson est l’homme qui ose. Tout.
    Rappelons tout de même que personne ne met en doute l’authenticité des documents publiés par Julian Assange. Au contraire… et c’est même parce qu’ils sont vrais qu’ils font si peur à nos gouvernants, pris ainsi les doigts dans la marmite de leurs mensonges, exactions, bavures, stupidités, jugements à l’emporte-pièce et autres amabilités diplomatiques…
    Et plus encore de leur incompétence à protéger leurs vilains secrets. Car si un site internet peut se procurer ainsi de tels secrets d’État, nombre de services secrets en sont probablement tout aussi capables. Ce n’est donc pas cela qui est grave pour eux, c’est que ces secrets soient ainsi connus de leurs peuples, c’est-à-dire des électeurs.
    Quant à l’initiative d’Éric Besson, elle est pour le moins dangereuse pour sa respectabilité, si tant est qu’il lui en reste encore beaucoup… Et le danger d’un effet boomerang d’une telle initiative n’est pas à écarter.
    En effet, l’hébergeur français OVH, sommé d’expulser le site Wikileaks n’est pas officiellement son hébergeur, mais simplement “le prestataire technique de la solution technique que le client a demandé”. OVH a donc décidé de saisir le juge des référés “afin qu’il se prononce sur la légalité ou pas de ce site sur le territoire français”, rappelant, à cette occasion, que “ce n’est pas au monde politique ni à OVH de demander ou décider la fermeture, ou pas, d’un site, mais à la justice.
    Et chacun sait la Justice est indépendante du pouvoir politique qui n’a pas à lui donner d’ordre. Enfin, c’est que les gouvernements affirment, à moins que parmi les 400 000 documents de Wikileaks, on apprenne le contraire. Improbable, bien sûr.

     
    Philippe Randa (7 décembre 2010)



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